9 octobre 1827

Pluie de Joyeuse


Du 9 au 11 octobre 1827, un épisode d’une extrême violence s’abat sur l’Ardèche. La rivière connait une de ses crues historiques.

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Le 9 octobre 1827, une pluie extraordinaire de 792 mm en 21 heures est relevée dans le petit village de Joyeuse.
La crue de l’Ardèche qui en résulta dura 3 jours.

Elle atteignit 17 m au moulin de Salavas, 19,25 m au pont d’Arc, 21,40 m à la maison Gournier. C’était à l’époque la plus forte crue connue de la rivière avant celle qui se produira en septembre 1890.


Des témoins de l’époque en ont fait d’excellentes descriptions (Source : Inventaire des épisodes de pluies en Ardèche, 1807-1994) :

"Le lundi 8 octobre, une pluie ordinaire commença à tomber, le soir rien ne faisait présumer qu’elle était l’avant-garde d’une inondation épouvantable.

Le lendemain, une pluie soutenue fit grossir les rivières ; vers 19 heures, les éclairs et les tonnerres inspiraient des craintes sérieuses

Dans la nuit du mercredi au jeudi (11 octobre) l’Ardèche déborda avec fureur, les deux arches du pont d’Aubenas, construites après l’inondation de 1772, furent emportées, ainsi qu’une partie du moulin de Voguë, l’entier pont de Saint-just, et 13 maisons de la commune de Saint-Martin.

A Vals, la Volane fit des ravages inouïs, deux arches du pont furent emportés, la cuisine de la fabrique de M.Malmazet au bateau disparut, avec 6 femmes ou enfants, qui tous périrent ; Ce jour-là disparurent les anciennes sources Saint-Jean et Madeleine. Un voyageur fut noyé avec son cheval, en passant sur le pont de Salindre. L’île de Boyer, sous le rocher de Jastre, fut tellement submergée que les fermiers gagnèrent les arbres où ils restèrent jusqu’au samedi matin.

A la pointe du jour, le batelier de Ville vint les délivrer de cette terrible position ; il les reçut dans une barque qu’il était allé chercher tout exprès au Teil. Une famille entière périt corps et biens à Ucel ; une mère et son enfant disparurent aussi à Ville. On trouva une quinzaine de morts à St-Pierre, à Laborie, etc.Le pont de Joyeuse et celui des Recollets à Largentière furent démantelés ; les terres horriblement endommagées, les chemins ravinés, les routes coupées.

La rivière de Chassezac fit également de grands ravages. On remarqua que la Volane fut plus élevée que l’Ardèche ; il était tombé beaucoup plus d’eau à Mézilhac et à Antraigues qu’à Mayres.

Les eaux de l’Ardèche ont atteint en 1827, des hauteurs vraiment prodigieuses : 16m10 au-dessus de l’étiage, au pont suspendu de Vallon.

Avant la terrible inondation du 22 septembre 1890, la crue de 1827 était d’ailleurs regardée, dans toute la partie comprise entre Vallon et le Rhône, comme la plus forte de toutes les crues connues.

La crue de 1827 fut peut-être plus exceptionnelle encore par sa durée que par son intensité. Elle fut une exception heureusement très rare, car elle dura trois jours et déversa dans le Rhône un volume d’eau de plus d’un milliard de mètres cubes."

Voici ce que M. de Montravel, qui a fait pendant 26 années (de 1805 à 1830) des observations météorologiques à Joyeuse, dit de la crue de 1827 :

"Le trait caractéristique d’une année de pluie sans exemple, c’est cette quantité d’eau de 81 pouces (2193 mm) qui surpasse de beaucoup tout ce qu’on a mesuré jusqu’à présent dans tous les lieux de l’Europe où les observations de ce genre sont pratiquées, sauf à Carphagnana, dans le Frioul.

Plus de 36 pouces (974 mm) dans le seul mois d’octobre, et 29 pouces 3 lignes (792 mm), le 9 de ce mois, dans l’espace de vingt et une heures, à compter de trois heures du matin jusqu’à minuit.

Ce dernier résultat est de nature à confondre toutes les prévisions possibles. Ceux qui n’auraient pas appris à évaluer ces sortes de résultats, seront mis suffisamment à portée de comprendre ce que 29 pouces 3 lignes d’eau ont d’excessif, lorsqu’on leur aura dit qu’ils sont l’équivalent de ce qui tombe ordinairement à Paris pendant dix-huit mois.

Les inondations désastreuses qui ont été occasionnées par ces mêmes pluies, ont surpassé tout ce dont on avait mémoire d’homme jusqu’à présent."

- Télécharger l’Inventaire des épisodes de pluies en Ardèche, 1807-1994, tomes 1 et 2, réalisé par Météo-France, Centre départemental de l’Ardèche, avec l’aimable autorisation du Conseil Général 07

- Au cours de cet épisode, la valeur de pluies recueillie en un jour figure parmi les plus fortes enregistrées en France métropolitaine depuis plus d’un siècle.