1980 Hyacinthe

Du 15 au 28 janvier 1980

La trajectoire de HYACINTHE restera dans les annales, avec ses deux boucles et trois passages au plus près de La Réunion. L’île est ainsi restée une quinzaine de jours sous les masses nuageuses actives du système, engendrant des cumuls de pluie colossaux qui ont provoqué des inondations et dégâts considérables. HYACINTHE détient toujours les records mondiaux de pluviométrie sur 10 et 15 jours.

Trajectoire de Hyacinthe

Formation et évolution

Au début de la deuxième quinzaine du mois de janvier 1980, les Mascareignes sont intéressées par une vaste zone de basses pressions relatives. Le 17, un minimum est identifiable et localisé à environ 220 km au nord-est de La Réunion. Bien qu’encore très faible et peu actif d’après les images reçues par satellite, le système est baptisé HYACINTHE.

Image satellitaire Noaa 5 en composition colorée du 17 janvier 1980 à 12h09 UTC (16h09 à La Réunion)

- 1er passage : HYACINTHE se déplace d’abord vers l’ouest-sud-ouest et passe le 18 janvier à 100 km dans le nord du département. Mais la tempête est faible et s’éloigne rapidement. Dans la nuit du 18 au 19, elle incurve sa trajectoire vers le nord-ouest et se renforce pour atteindre le stade de cyclone (à noter que cette évolution est peu classique : en général une composante nord du déplacement amène une baisse d’intensité). Le 19, à 8 heures, un œil est visible sur l’image reçue du satellite NOAA 6. Il permet de positionner le centre du système à 380 km dans le nord-ouest de la Réunion.

Image satellitaire Noaa 5 en composition colorée du 19 janvier 1980 à 11h47 UTC (15h47 à La Réunion)

Dans la nuit du 19 au 20, l’intensité du météore diminue (proximité du relief et composante nord du déplacement). Les 20 et 21, il continue de s’affaiblir et repasse au stade de tempête tropicale modérée. HYACINTHE décrit une boucle vers l’île de Sainte-Marie (Madagascar) avant de plonger vers le sud. Le 23, un changement de trajectoire progressif vers l’est-nord-est la rapproche de La Réunion.

Pendant tout ce temps, où elle est plus proche de Madagascar que du département, une masse pluvio-orageuse détachée du système se maintient sur La Réunion. Des précipitations de très forte intensité s’abattent sur le Sud et provoquent des dégâts importants sur le réseau routier. Un éboulement entraînant une maison cause la mort de deux enfants.



- 2ème passage : Le 24, la tempête tropicale continue de se rapprocher de La Réunion qui se trouve alors dans un amas nuageux extérieur à la masse nuageuse dépressionnaire principale située au sud-ouest.

Image satellitaire Noaa 6 en palette Dvorak du 24 janvier 1980 à 3h54 UTC (7h54 à La Réunion)

Dans la nuit du 24 au 25, HYACINTHE passe à 125 km au sud-ouest de la Pointe des Galets.
Les pluies persistent et provoquent le débordement des ravines. Des morts sont à déplorer, souvent dues à des tentatives de franchissement de torrents. La partie sud de l’île, protégée par les reliefs est relativement épargée.



- 3ème passage : Le météore opère un nouveau changement de trajectoire qui lui fait décrire une large boucle pour revenir à proximité des côtes le 27 au stade renforcé de forte tempête tropicale. Dans l’après-midi elle passe à 60 km au sud de Saint-Pierre puis s’éloigne ensuite vers le sud-est.

Image satellitaire (partielle) Noaa 6 en composition colorée du 27 janvier 1980 à 4h28 UTC (8h28 à La Réunion)

Bilan des dégâts

Les dégâts sont considérables, notamment sur le Nord, et dus principalement aux pluies torrentielles.
Bilan humain
Il y a eu au total 25 victimes dont 13 suite à des glissements de terrain (3 le 19 janvier à Petite-Ile et 10 le 28 à Salazie, avec la mort d’une famille entière). La majorité des autres victimes sont liées à des actes d’imprudence (traversées de radiers submergés à pied, observation de la montée des eaux à proximité du cours d’eau en crue, jeux autour de la crue…). Cet aspect a d’ailleurs été mis en évidence par la presse locale de l’époque, mais a également soulevé une gestion de l’alerte alors inadaptée face à un épisode aussi atypique que le cyclone Hyacinthe (en raison notamment de sa durée) : les seuils de vigilance et d’alerte se fondaient sur l’échelle de Saffir-Simpson et ne prenaient pas en compte l’intensité pluviométrique et la montée des eaux.
Dégâts économiques
La durée exceptionnelle de l’épisode pluvieux a entraîné la fragilisation des sols de l’île, augmentant significativement le risque de glissements de terrain et le transport solide dans les cours d’eau. En raison de l’accumulation d’une grande quantité de matériaux grossiers à l’exutoire des cours d’eau, de nombreux ouvrages d’art et de protection ont été emportés.
- Réseau routier fortement endommagé.
- Réseau de distribution d’eau, d’électricité sérieusement touchés.
- Réseau téléphonique détruit à 30-40% : 8 000 installations téléphoniques sur 25 000 sont en dérangement après le passage de Hyacinthe.
- Bâtiments publics dégradés par les eaux pluviales et les débordements de boue et de galets.
- 2000 maisons ou cases individuelles endommagées dont 288 détruites à 100%. Ce fort endommagement a rappelé la problématique de la fragilité des cases traditionnelles et plus généralement du bâti précaire à La Réunion, constat déjà réalisé lors du cyclone Jenny en 1962.
- Cultures vivrières, fruitières et florales anéanties ou partiellement détruites.
- Pertes importantes dans l’élevage : 630 boeufs, 2 000 porcins, 100 ovins, 1 000 caprins, 40 000 poules et poulets, 5 000 lapins.

La route nationale à l’est de Saint-Denis au niveau de la Rivière des Pluies après le passage de Hyacinthe (source : DEAL Réunion)

Suite au cyclone Hyacinthe, un Plan d’Endiguement systématique des Ravines ou PER a été mis en place à l’échelle de l’île. De même, le système d’alerte a été amélioré et adapté aux précipitations intenses quelques années après l’évènement.


Bilan climatologique

La quasi-totalité des records mensuels de pluie ont été battus. Les postes des cirques et de la région sous le vent ont recueilli en 12 jours des précipitations supérieures à leur moyenne annuelle. Localement, comme à Palmiste Rouge dans le cirque de Cilaos, ces pluies dépassent encore aujourd’hui le cumul annuel (hors 1980) le plus élevé jamais enregistré.
À l’époque, ces pluies diluviennes avaient battu tous les records mondiaux de pluviométrie sur des durées allant de 72 heures à 15 jours. Aujourd’hui, comme records associés à HYACINTHE, il ne subsiste plus que les cumuls sur 10 et 15 jours, avec respectivement 5 678 mm et 6 083 mm enregistrés au cratère Commerson à 2310 m d’altitude. C’est le cyclone GAMEDE, en février 2007, qui a pris la relève pour les cumuls sur 72 heures et 96 heures.


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Ci-dessous l’animation des pluies cumulées de HYACINTHE sur La Réunion du 16 au 27 janvier 1980 :

Accès aux cartes de l'épisode (avec un minimum de 200 mm):

Episode de 12 jours du 16 JANVIER 1980 au 27 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 16 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 17 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 18 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 19 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 20 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 21 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 22 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 23 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 24 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 25 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 26 JANVIER 1980
Pluies en 1 jour : 27 JANVIER 1980