Du 24 au 27 Février 2007

Le cyclone tropical GAMEDE restera dans les annales par sa taille extrêmement imposante et sa trajectoire quelque peu capricieuse qui l’a fait s’approcher deux fois des côtes réunionnaises. La Réunion a ainsi battu, 27 ans après HYACINTHE, ses propres records mondiaux de précipitations sur les durées de 3 à 9 jours.

GAMEDE, classé cyclone tropical intense pendant sa phase maximale, est resté à moins de 400 km de La Réunion pendant près de 4 jours, avec une zone d’influence extrêmement vaste en terme de vents et de précipitations. Les vents ont été certes forts sur une longue durée, mais n’ont pas revêtu de caractère très exceptionnel (167 km/h au Gîte de Bellecombe, 163 km/h à La Plaine-des-Cafres, 140 km/h à Gillot). Par contre, les pluies, bien que n’ayant pas connu de pics d’intensité extrêmes, ont été très régulières et très abondantes dans tous les hauts de l’île, produisant par accumulation des lames d’eau remarquables voire exceptionnelles sur des durées d’un à plusieurs jours.

Chronologie

Dès ses débuts, au sud-est de l’archipel des Chagos, la perturbation revêt certaines caractéristiques la rapprochant d’une dépression de mousson, qui vont en particulier grandement conditionner la taille nettement au-dessus de la normale du futur cyclone. C’est dans la nuit du 20 au 21 que la tempête tropicale GAMEDE est baptisée. Elle surfe alors vers l’ouest le long du 15^ème parallèle Sud sur la façade nord de hautes pressions subtropicales fermement établies. En soirée du 21 elle se situe à 800 km au nord-est de l’île Rodrigues et infléchit ensuite sa course progressivement ouest-sud-ouest. Elle gagne en intensité et atteint le stade de cyclone le 23. Dans l’après-midi du 24, le centre du cyclone transite au plus près de l’île Maurice, à un peu plus de 230 km au nord-ouest.

À la Réunion, si les premières pluies débutent sur le massif du volcan dans la nuit du 23 au 24, elles s’étendent ensuite progressivement à l’ensemble des hauts. Les pluies sont beaucoup plus irrégulières sur le littoral, à l’occasion des passages successifs des bandes périphériques associées au système.


1^er passage :

Un peu avant l’aube du 25, GAMEDE transite au plus près de La Réunion, à un peu moins de 230 km au nord-nord-ouest. C’est grâce à un changement de trajectoire in extremis que l’île doit de ne pas avoir été davantage approchée. Le cyclone s’éloigne quelque peu en ralentissant du fait que la cellule anticyclonique tropicale, désormais au sud du Canal de Mozambique, s’est décalée vers l’ouest plus rapidement que le météore et qu’elle n’est alors plus capable de soutenir le déplacement ouest-sud-ouest qu’elle avait assuré jusque-là. Le cœur du cyclone présente sa meilleure définition en fin de journée du 25. Il est alors à son apogée, au stade de cyclone tropical intense (CTI).

GAMEDE a une telle taille qu’il peut influencer et modifier son environnement, tout en ayant également naturellement tendance à se comporter de manière plus indépendante par rapport à lui. Il hésite alors sur la trajectoire à adopter, jusqu’à observer un arrêt prolongé en fin de journée du 26. En stationnant sur place, le cyclone déclenche un puissant processus de refroidissement des eaux océaniques sous-jacentes qui cause l’autodestruction de son réservoir d’énergie. La convection au cœur du météore implose et le système s’affaiblit.

Mais malgré cet éloignement, les conditions restent très mauvaises sur l’île avec toujours des fortes pluies, notamment dans les hauts, à cause du relief qui n’en finit pas de subir l’assaut des bandes périphériques associées au système.

Après le 1^er passage de GAMEDE, le 25, on pouvait déjà faire un premier bilan :

- un blessé grave.
- la destruction du pont de la rivière Saint-Etienne qui relie Saint-Louis à Saint-Pierre, à la suite de la rupture d’un barrage naturel. Le Sud est coupé en deux. C’est l’image forte qui restera de ce cyclone.
- 100 000 foyers sans électricité, et autant privés d’eau
- 40 000 abonnés privés de téléphone fixe
- une trentaine de radiers submergés
- plusieurs glissements de terrain
- environ 250 personnes hébergées dans les centres communaux
- une zone inondée à Sainte-Suzanne

2^nd passage :

Dans la nuit du 26 au 27, le météore se décide enfin et descend vers le sud. Il effectue alors un second passage au plus près de La Réunion à 250 km à l’ouest dans la soirée du 27. L’ouest du département est ainsi touché à son tour et il est heureux pour La Réunion que ce plongeon vers le sud ait été différé de 24h, sinon ce serait un cyclone à son maximum d’intensité qui aurait transité bien plus près des côtes réunionnaises.

En dehors de la houle cyclonique, qui est alors à son maximum avec une hauteur de 11,7 mètres mesurée au Port, ce deuxième passage génère des pluies un peu moins fortes puisque l’île reste à l’écart des fortes précipitations résiduelles présentes dans le secteur est du centre dépressionnaire. GAMEDE s’éloigne ensuite assez rapidement.

Après le 2^nd passage de GAMEDE, le bilan s’alourdit :

- on déplore 2 victimes, dont l’une est emportée par les flots alors qu’elle tentait de traverser un radier en voiture
- les routes de Salazie et Cilaos sont coupées
- plusieurs familles sont évacuées à Mare à Poule d’eau, Ilet Quinquina et la Colline.

Suivi Radar

Parfaitement suivi en passant à proximité du radar de La Réunion, l’œil du cyclone, qui fait 55 à 60 km de diamètre, est aussi grand que La Réunion. On voit sur l’image ci-dessous qu’une des bandes périphériques actives du système touche La Réunion et on notera que les reliefs occultent la partie sud de l’île.

Sur l’animation radar (ci-dessous), on voit l’œil effectuer une petite boucle en fin d’après-midi et soirée du 25, interrompant le déplacement nord-ouest qu’il avait entamé depuis environ 6h. On aurait pu croire que le cyclone plongerait alors vers le sud, mais c’est vers l’ouest qu’il a redémarré, retardant l’échéance de 24h.

Bilan climatologique

À Commerson, le cumul de pluie sur 72 heures (3 930 mm) a dépassé le précédent record mondial jusqu’alors détenu par Grand-Îlet (3 240 mm) pendant HYACINTHE. Globalement, sur l’ensemble des hauts de l’île, et si l’on se réfère aux cumuls sur 4 jours, les valeurs de l’épisode GAMEDE sont proches ou supérieures à ce que l’on a pu observer à l’occasion du cyclone HYACINTHE.

Entre le 24 et le 27 février, on relève :

 en 24 heures : 1628 mm au Cratère Commerson, approchant ainsi le record mondial officiel de 1825 mm mesuré à Foc-Foc avec le passage de DENISE en 1966. On relève aussi 1489 mm à Hell-Bourg.

 en 48 heures : 2489 mm au Cratère Commerson, ce qui battait alors le record mondial de 2467 mm d’Aurère datant de 1958. Depuis, le record mondial est détenu par Cherrapunji (en Inde) avec 2493 mm. Autres valeurs remarquables : 2368 mm à Hell-Bourg.

 en 72 heures : 3930 mm au Cratère Commerson et 3271 mm à Hell-Bourg, dépassant ainsi le précédent record mondial de 3240 mm qui avait été mesuré à Grand-Ilet avec le passage de HYACINTHE en 1980.

 en 96 heures : 4936 mm au Cratère Commerson et 3637 mm à Hell-Bourg. Là encore, on dépasse largement le précédent record mondial qui était de 3551 mm au Cratère Commerson avec HYACINTHE.

Globalement, sur l’ensemble des hauts de l’île, et si l’on se réfère aux cumuls sur 4 jours, les valeurs de l’épisode GAMEDE sont proches ou supérieures à ce que l’on a pu observer à l’occasion du cyclone HYACINTHE.

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Ci-dessous l’animation des pluies cumulées de Gamede sur La Réunion du 24 au 27 février 2007 :